le couple franco-allemand : je t’aime moi non plus !
24 octobre 2010En ce mois d’octobre la République fédérale d’Allemagne commémore les 20 ans de sa réunification. Evénement hautement important qui a mis fin, symboliquement, à la seconde guerre mondiale, et à la guerre froide qui a pris le relais et qui a permis, au-delà, le retour dans la maison Europe de tous les pays « dits de l’Est ». Ce fut le fameux élargissement de dix pays en 2004, véritable devoir moral réunissant enfin les peuples européens que l’histoire et la barbarie avaient trop longtemps séparé.
Mais cette commémoration allemande nous amène, aujourd’hui à réfléchir sur le très fameux couple franco-allemand.
Depuis la déclaration Schuman de 1950, ce très fameux couple est perçu comme la cheville ouvrière de l’Europe. C’était vrai dans l’Europe des six. C’est resté vrai depuis, avec des hauts et des bas. Comme dans tout couple. Un seul exemple : sans l’amitié, la complicité historique entre Mitterrand et Kohl, il n’y aurait pas eu de Traité de Maastricht, et donc pas de monnaie unique. L’Europe a d’ailleurs avancé avec des couples politiquement différents, voire divergents : Adenauer / de Gaulle ; Giscard d’Estaing / Helmut Schmidt ; Kohl / Mitterrand ; Chirac / Schröder.
Depuis quelques années, ça commençait à tanguer un peu avec le tandem Chirac / Schröder. Mais depuis 2007, le couple bat vraiment de l’aile. Malgré les démentis diplomatiques. Chacun de nous peut d’ailleurs le constater chaque jour davantage : il suffit de lire les communiqués, et de voir les visages ! Quoi de semblable entre Nicolas Sarkozy bouillonnant et hyper-présent, et Angela Merkel, moins attentive à son image, mais plus tenace ?
Le choc de ces deux personnalités traduit bien le choc culturel entre un esprit allemand et un esprit plus latin. La crise grecque et le dernier incident avec la Commission européenne l’ont bien révélé. La position de l’Allemagne vis-à-vis de la Grèce était très claire : en jeu, le ras le bol de payer pour les imprévoyants, les cigales, qui vivent sur le dos des vertueux et des fourmis. L’Allemagne a payé toute seule sa réunification, sans l’aide de l’Europe. Et elle a payé le prix fort : financièrement, économiquement, socialement. Elle a payé cher aussi son taux de change à l’euro lors de la naissance de la monnaie unique (2 marks pour 1 euro, elle qui était déjà vertueuse). Comment ne pas comprendre alors son exigence de transparence, de sincérité économique, en un mot respect des traités, y compris du Traité de Maastricht. Elle en a marre des pays cigales dont les plus importants veulent donner des leçons, en plus. La coupe, déjà bien pleine, a débordé lors du dernier Conseil européen agité par la lamentable affaire des Roms. Lorsque le président de la République française s’est permis de déclarer, en pleine conférence de presse que le gouvernement de madame Merkel allait, lui aussi, expulser ses Roms, le démenti cinglant, clair et net de madame Merkel ne s’est pas fait attendre ! Claque diplomatique sans précédent. Il y a longtemps qu’un chef d’Etat n’avait pas démenti, publiquement, un autre chef d’Etat. Heureusement qu’on n’est plus au temps de la politique de la canonnière !
prochain rendez-vous sur les ondes de RCF, mercredi 27/10 à 18h15 pour un édito sur “la Chine et l’Europe, ou le jeu du chat et de la souris”