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Vous consultez les archives de L’Euro-blog d’Alain Malégarie pour le mois octobre, 2017.

Renaissance européenne ?

22 octobre 2017

J’espère que le mois de septembre, dit de « rentrée », aura été, pour l’avenir de l’Europe, le mois des discours qui feront date. Et des discours très importants. Pour une fois. Avec nombre de propositions pour l’Europe. L’avenir dira s’ils seront historiques. Discours de Macron début septembre à la conférence des Ambassadeurs ; discours de Macron à Athènes (08/09) ; discours encore, et surtout, de Macron à la Sorbonne (26/09) ; mais aussi discours de Jean-Claude Juncker, sur l’Etat de l’Union (13/09).

Que de discours, souvent en phase ! Que je vais essayer de décrypter et d’analyser.

1/ Discours de Jean-Claude Juncker, président de la Commission européenne, sur l’état de l’Union

Depuis quelques années, la Commission européenne, à l’instar de ce qui existe aux Etats-Unis depuis longtemps, présente chaque année son discours sur « l’ état de l’Union ». Le président Juncker y dévoile une vision très personnelle de ce que doit être l’Union à 27, désormais. « Il faut parachever la maison « Europe » quand il fait beau ». En effet, la situation économique s’améliore partout en Europe, la crise de 2008 semble désormais loin, avec des taux de croissance pour 2017 et 2018 de 2% environ. Les forces populistes et extrémistes reculent, en Belgique, aux Pays-Bas et en France, même si le résultat des dernières élections en Allemagne peut nous inquiéter, et si la situation en Pologne ou en Hongrie de déni de l’Etat de droit peut dérouter les démocrates que nous sommes. Sur la Pologne et la Hongrie, Juncker rappelle que les Etats membres doivent se conformer à la jurisprudence européenne, en particulier sur les demandeurs d’asile. De ce temps « où les vents sont favorables », Jean-Claude Juncker veut faire aboutir un certain nombre de chantiers, avec des unions sectorielles, sur le numérique, l’énergie, le bancaire par exemple. Il reprend aussi à son compte une des propositions de campagne d’Emmanuel Macron, à savoir l’organisation de « conventions démocratiques » qui permettront aux citoyens européens de se prononcer sur quelques réformes fortes, comme la création d’un poste de ministre de l’économie et des finances, ou le renforcement du respect de l’Etat de droit. Autre idée reprise du programme de campagne d’Emmanuel Macron, la création de listes transnationales au sein d’une circonscription paneuropéenne pour les prochaines élections européennes de juin 2019, à la place des sièges des actuels députés britanniques (73 députés). Enfin il préconise le recours à la clause passerelle, prévue par l’article 48 du traité de Lisbonne, qui permet de statuer à la majorité qualifiée des Etats membres, dès lors qu’aucun parlement national n’a exprimé d’opposition dans les 6 mois. C’est une clause très technique, mais elle aurait l’avantage de renforcer le processus législatif et d’augmenter les décisions prises à la majorité, et cela sans avoir à réécrire un nouveau traité, processus long et aléatoire.

Son discours est structuré autour de 5 grands thèmes : tout d’abord le commerce avec des propositions pour renforcer l’agenda commercial de l’Union européenne ; sur l’avenir de la zone euro ; sur la création d’un superviseur européen unique des marchés des capitaux. Et dans un domaine moins économique, mais tout aussi crucial pour la place de l’UE dans le monde et sa sécurité, il propose une unité européenne de renseignement, et surtout la fin de l’unanimité dans le domaine des affaires étrangères, afin de mettre fin à l’inertie de l’Europe dans les grands enjeux ou les crises géopolitiques.

Le président Juncker veut en effet renforcer l’agenda commercial de l’Union européenne.

Cela signifie, entre autres, ouvrir des négociations de libre-échange avec l’Australie et la Nouvelle-Zélande, d’ici fin 2017. Et au-delà avec les pays du Mercosur (Argentine, Brésil, Paraguay et Uruguay), et avec le Mexique. Et, ce à la suite des accords qui viennent d’être conclus avec le Canada et le Japon.

Ces nouvelles négociations devraient se faire dans une plus grande transparence, « les citoyens ont le droit de savoir ce que la Commission propose. Fini le temps de l’opacité, fini les rumeurs ». De même, la Commission s’engage à réclamer le principe de réciprocité « nous devons obtenir autant que ce que nous donnons ». Car ce sont deux points de vigilance des citoyens, et partant d’incompréhension et de rejet de ces accords de libre-échange. On l’a bien vu avec le CETA. On doit être dans le « donnant-donnant » ou le « gagnant-gagnant » S’y ajouteront un cadre communautaire pour le contrôle des investissements des pays tiers dans les secteurs stratégiques de l’UE, ainsi qu’une conditionnalité au respect des normes sociales, sanitaires et environnementales, pour l’accès au marché européen (le 1er en termes de consommateurs).

L’avenir de la zone euro

Le président Juncker a exprimé sa préférence pour un ministre européen de l’économie et des finances, qui serait responsable devant le Parlement européen, et qui fusionnerait les fonctions préalables de Commissaire aux affaires économiques et monétaires et de Président de l’Eurogroupe, plutôt que pour un parlement de la zone euro, car pour lui, « le parlement de l’eurozone, c’est le parlement européen », donnant ainsi satisfaction aux pays de l’Europe centrale et orientale qui craignait la mise en place d’une Europe à deux vitesses, et contredisant, sur ce point, le président Macron.

Il a rappelé aussi que l’euro avait vocation à être la monnaie de toute l’Union européenne, à l’exception du Danemark, qui avait négocié une clause de opting-out au moment du traité de Maastricht de 1992 (et du Royaume-Uni aussi, mais le Brexit exclut d’office le Royaume-Uni de l’avenir de l’Union européenne, et donc de la zone euro). Pour faciliter cette future adoption de la monnaie unique, Junker préconise la création d’un instrument de pré-adhésion à l’euro, qui permettrait aux pays de l’UE non encore membres de la zone euro, de bénéficier d’une assistance technique et financière, un peu sur le modèle des instruments de pré-adhésion à l’UE.

Juncker réaffirme son soutien à l’instauration d’un Fonds monétaire européen qui viendrait remplacer le Mécanisme européen de stabilité ; qui avait sauvé la Grèce et qui renforcera la solidarité entre Etats. Il a en revanche réaffirmé son opposition à la mise en place d’un budget propre à la zone euro, proposé par Macron.

Un superviseur européen unique des marchés de capitaux

Cette nouvelle fonction s’inscrit dans le prolongement et l’achèvement de l’UMC, (l’Union des marchés de capitaux) et dans l’Union bancaire. L’objectif de ce superviseur européen est de remédier à la fragmentation de la supervision bancaire, répartie entre les autorités nationales, et de renforcer ainsi la surveillance des niches financières qui pourraient se développer. En prolongement, Juncker plaide pour un élargissement de l’Union bancaire à l’ensemble des Etats membres, de façon à ce que toutes les banques européennes soient soumises aux mêmes règles et à la même surveillance. A la bonne heure…

Est annoncée aussi l’adoption à courte échéance de propositions comme « le produit paneuropéen d’épargne-retraite-individu » ; les amendements proposées au règlement sur les infrastructures de marché européen, dont le nouveau mécanisme de supervision des chambres centrales de compensation situées en dehors de l’UE ; et un renforcement juridique de la BCE en matière de règlement des titres financiers.

Sur les autres points relevant de la sécurité et de la place de l’UE dans le monde

Le président Juncker a annoncé la mise en place d’une Unité européenne de renseignement (Macron aussi), permettant l’échange automatique de données sur les terroristes ou les combattants étrangers avec les services nationaux de renseignements et de police.

Par ailleurs, il propose que le futur Parquet européen se voie confier des compétences en matière de poursuites de crimes terroristes. Ce qui semble logique, car le terrorisme ne connaît pas de frontières, et l’Union européenne doit présenter un front uni face à ces grandes menaces qui viennent autant de l’extérieur que de l’intérieur.

Enfin, il préconise la fin de l’unanimité dans le domaine des affaires européennes, et ce afin de pouvoir prendre des décisions plus vite et de repositionner l’Europe dans le champ géopolitique.

Les affaires étrangères vont souvent de pair avec la Défense, et dans ce domaine, Juncker a souhaité la mise en place d’un programme de développement industriel européen de défense, et d’un plan d’action européen de défense. Macron ke rejoint, là encore.

Sur la question des potentiels futurs élargissements, le président Juncker a rappelé que le respect de l’Etat de droit, de la justice et des droits fondamentaux était un incontournable absolu si un pays veut adhérer à l’Union européenne. Et de ce fait, la Turquie « s’éloigne à pas de géants de l’UE ». Juncker a même lancé un appel solennel à l’égard de ce pays : « libérez les journalistes, et pas seulement nos journalistes ». A l’inverse, il faut continuer à offrir des perspectives d’élargissement crédibles aux pays des Balkans occidentaux, afin de stabiliser la région et notre voisinage. De nombreux micro-Etats sont prévus : Serbie, Macédoine, Monténégro, Kosovo, Albanie et Bosnie-Herzégovine. Mais ces élargissements ne se feront pas sous le mandat du président Juncker, puisqu’il a déjà indiqué qu’il ne se représenterait pas en 2019, après les élections européennes. Je rappelle ici que le Monténégro et le Kosovo, qui n’avaient pas de monnaie propre, ont déjà l’euro (à leur demande) !

2/ Discours d’ Emmanuel Macron du 26 septembre à la Sorbonne, sur l’avenir de l’Europe

Avant même ce discours qui se veut fondateur (précurseur ?) d’une dynamique européenne, notre président a déjà parlé d’Europe, dès sa campagne présidentielle, ce qui est rare en France (!), mais aussi, fin août/début septembre, lors de la conférence des Ambassadeurs ( « L’Europe ne peut pas être un simple marché ») ou encore lors de son discours d’Athènes devant le Parthénon, le 8 septembre. A chaque fois, il avait donné le ton sur ses grandes ambitions pour l’Europe. Un commentaire sur celui d’Athènes, car il avait déjà bien annoncé « la couleur », je cite : « nous Européens, qu’avons-nous fait de notre souveraineté, de la démocratie, et nous faisons-nous confiance ? Pour Macron, la crise grecque a révélé que ces trois mots sont en danger, face au populisme, au souverainisme, à l’euroscepticisme. Déjà, il n’a pas peur de dire les choses, d’appeler un chat, un chat ! Il avait déjà évoqué son projet de lancer, dès 2018, des conventions démocratiques pour que les peuples puissent débattre sur chaque mesure préparée par des techniciens. Bien sûr, il entend faire des propositions concrètes, élaborer une feuille de route, et retrouver le « sel de la zone euro et le sel de la démocratie européenne ».

La presse a accueilli avec bienveillance ce discours. Le Figaro : « Pas sûr que la lourdeur des procédures européennes cède devant son héroïsme politique ».

Challenges approuve cette intervention, soulignant que Macron est même hostile à l’intrusion du FMI dans les crises de la zone euro, récusant un superviseur des affaires européennes. Il précise même : « le FMI doit faire preuve de bonne foi dans la dernière phase du plan d’aide à la Grèce », fustigeant des « méthodes technocratiques et lunaires ». J’imagine qu’il a dû être très applaudi, de dire cela aux Grecs ! Il veut donc rendre toute sa souveraineté à l’Europe, sans ingérence étrangère à l’UE. Bravo ! Je n’avais jamais entendu un politicien européen dire cela ! Si ! Quelqu’un l’avait déjà dit, et je tiens à lui rendre cet hommage : il s’agit de Jean-claude Trichet, alors président de la BCE, qui refusait que des non-Européens rentrent dans la Troïka ! Et les chefs d’Etat ne l’avaient pas écouté ! Il est vrai que Trichet n’était pas un politicien…Imagine-t-on que la BCE, ou la BEI, s’ingère dans un programme de surveillance et de financement aux Etats-Unis?

Macron a conclu son discours par des propos très lyriques : « L’Europe c’est une odeur, une couleur, une lecture. C’est la convivialité, la civilité, une culture. C’est un imaginaire commun ».

Et Challenges, décidément convaincu, de conclure : « Ce projet de refondation est beau, ambitieux, séduisant. Il a du souffle. Il parle au cœur, aux tripes, et à l’âme des élites. Pas évident, en revanche, que les eurosceptiques seront convaincus. Il a promis à la Jeunesse européenne « souveraineté, démocratie et culture ».

Mais beaucoup de Jeunes, surtout au Sud, rêvent aussi, très concrètement, d’un Job.

Et puis est arrivé le 26 septembre, et ce discours à la Sorbonne (1h40 !), devant des centaines d’étudiants français et d’autres pays d’Europe, et il est allé beaucoup plus loin dans sa vision à court et moyen terme et ses projets pour la refondation de l’Europe.

Macron, d’entrée de jeu, a démarré très fort : « Je vais vous parler d’Europe, encore diront certains, et ce ne sera pas la dernière fois, il faudra s’y habituer !! L’Europe est une idée, depuis des siècles. L’Europe aurait pu être engloutie au XXème siècle, avec les deux guerres mondiales. Je ne permettrai pas la haine, je lutterai toujours contre la haine, les extrémistes, les identitaires ».

Cette fois, c’est clair. Emmanuel Macron oeuvrera pour une Europe forte et respectée dans le monde, pour une Europe démocratique (chasse aux nationalistes, aux racistes), pour une Europe unie et pour une Europe réconciliée avec ses citoyens. Je résume ci-dessous l’essentiel de ses … 77 propositions !

Pour une souveraineté européenne.

Il nous faut une défense européenne autonome, complémentaire de l’OTAN. On a déjà un fonds de la défense. Mais il faut développer une culture commune. Je propose qu’on la construise, en proposant à nos partenaires d’accueillir des militaires de tous les autres Etats européens. Puis on créera une force d’intervention commune opérationnelle. Pareil pour la lutte contre le terrorisme et la criminalité, avec un parquet européen regroupant toutes les enquêtes judiciaires de tous les pays, et une Académie européenne du renseignement anti-terroriste.

Le dérèglement climatique vole chaque semaine des vies humaines, en Europe, avec multiplication de catastrophes de moins en moins naturelles.

Là encore, il faut avoir une force collective, coordonnée. L’action solitaire d’un pays ne servirait à rien.

Assurer le mot souveraineté en protégeant nos frontières extérieures.

Les migrants ne sont pas une crise, mais un défi de long terme. L’Europe n’est pas une île. Donc nous aurons toujours des migrations et des réfugiés. Nous devons aider ceux qui sont submergés par les arrivants.

On n’a qu’un choix : car se barricader derrière nos frontières serait illusoire. Je souhaite que soit créé un office européen de l’Asile, avec un fichier européen biométrique, une police des frontières européenne.

Je veux l’Europe de la sécurité.

Il faut aussi mieux aider les pays « émetteurs » de migrants.

Relancer les taxes sur les transactions financières européennes (principe déjà voté par 11 Etats membres ! Le Royaume-Uni le fait déjà seul, mais de façon modeste)

Il faut le faire, au profit de l’aide au développement économique. Développer un partenariat avec l’Afrique : sur l’éducation, la santé, l’économie. Sinon d’autres puissances le feront…

Transformation écologique / énergétique.

L’Europe est sur un entre-deux.

Il faut développer nos interconnexions avec l’Espagne, le Portugal ; développer un monde européen de l’énergie, avec des prix planchers.

Il faut aussi une taxe sur le carbone aux frontières extérieures de l’Europe (de 25 à 30 € la tonne)

Révolution numérique

Là encore, nos économies ne peuvent se développer en restant en circuit fermé.

Il faut créer une agence européenne pour l’innovation (à l’instar de ce qu’ont fait les USA pour eux). Soyons innovateurs, et pas « suiveurs ». Car les grands champions du numérique sont tous américains. Créons des champions européens. Nous devons défendre aussi nos droits d’auteur.

La puissance économique et monétaire européenne.

Nous devons développer une puissance industrielle ; une puissance spatiale.

Une puissance économique, solide, ne peut se construire qu’avec une même monnaie. (NB : Juncker veut l’euro pour les 27).

« Je n’ai pas, moi, la zone euro honteuse ».

Principal enjeu : réduire le chômage qui frappe encore un jeune sur 5 en zone euro.

Il ne s’agit pas de mutualiser nos dettes. Mais de créer une économie européenne égale des Chinois et des Américains. A ce propos, Macron se bat aussi pour que l’UE taxe les GAFA (Google, Amazon, Facebook et Apple) de façon harmonisée (en mettant fin au « dumping fiscal » de l’Irlande ou des Pays-Bas qui hébergent ces monstres du Net). Il a encore enfoncé le clou au récent Conseil européen des 19 et 20 octobre.

Pour ce faire, il nous faut un budget commun, pour pouvoir investir : un budget bien plus important que l’actuel, grâce aux taxes européennes. Il faut aussi lui allouer un impôt. Il faut aussi un ministre de l’Economie et des Finances commun.

Construisons une zone euro forte, solidaire (« même si tous les autres pays de l’Union ont vocation à adopter l’euro »). On n’aura pas d’Europe forte et prospère si elle n’est pas unie.

On peut reprendre la bonne formule de Jacques Delors : “Le modèle économique européen doit se fonder sur trois principes : la concurrence qui stimule, la coopération qui renforce et la solidarité qui unit.” (NB : Jacques Delors avait dit cela il y a vingt ans et c’est encore juste).

Travailleurs détachés

Le problème c’est qu’on a développé des marchés moins disant.

« Je me bats pour modifier cette directive qui nous oppose ». Macron est revenu à la charge au Conseil européen des 19 et 20 octobre.

« Je veux une harmonisation fiscale et sociale. Car on ne peut accepter une concurrence fiscale et sociale entre nous ». Créons des fourchettes de taux se rapprochant d’ici le budget de l’UE de 2020.

« On ne peut avoir des fonds européens qui financent des taux de fiscalité ».

On doit aller aussi vers une convergence sociale : car sinon on peut observer les conséquences, par exemple au Royaume-Uni qui l’a payé cher, avec le Brexit. Ou encore les électeurs de Donald Trump, qui ont voté contre ces différences entre Etats. Nous devons travailler sur la définition d’un salaire minimum commun, progressivement.

Pour les travailleurs détachés, il nous faut donc proposer un fonds de solidarité pour les pays les plus en retard.

Ce qui tient l’Europe, c’est sa culture

Chaque étudiant (ou la moitié des classes d’âge) devra parler au moins deux langues européennes d’ici 2024. tout jeune devra passer au moins 6 mois dans un autre pays européen, qu’il soit étudiant ou apprenti.

Développons un réseau universitaire fort pour fluidifier les parcours d’études de chaque étudiant ; créons un véritable semestre européen et des cours européens

Lançons aujourd’hui un « processus de la Sorbonne » comme jadis il y eut un « processus de Bologne ».

Mounier : « l’universel prépare les hommes à plusieurs langues »

Les parcours universitaires façonnent aussi l’Europe, celle du multilinguisme.

Souveraineté, unité et démocratie sont indissociables pour l’Europe.

Les pères fondateurs ont beaucoup fait. Puis leurs idées et projets ont été fracassés en 2005 par le double vote négatif en France et aux Pays-Bas sur le projet de constitution européenne.

Les dirigeants européens sont alors rentrés en « glaciation », ils n’ont plus rien proposé à leurs peuples en matière d’Europe. Pour leur tranquillité et leur carrière politique. 12 ans de perdu, pendant lesquels le monde avançait, se développait, nous rattrapait en partie.

On ne peut plus rester comme ça, inertes face aux défis du monde, qui lui avance toujours plus vite. Et il ne faut plus poser par référendum une question binaire oui / non. Car ce sera toujours « non ». Mais il faut aussi faire participer les citoyens européens.

Il faut débattre démocratiquement, à l’échelle européenne, avec les peuples, expliquer ce qu’on peut faire pour faire progresser l’UE, d’ici l’élection de 2019. Faire des « conventions citoyennes » démocratiques dans chaque pays.

C’est pour cela aussi que je prône une liste transnationale pour 2019 (et il faut aussi organiser la répartition des 73 eurodéputés du Royaume-Uni) où on votera partout en même temps en Europe.

Je souhaite, pour au moins la moitié du Parlement européen que l’on travaille à l’élaboration de listes transnationales (car aujourd’hui les dirigeants de parti ne parlent jamais d’Europe dans ces campagnes législatives européennes, détournant ces élections à leur profit et intérêt locaux).

« En 2024, je demande que l’Hymne à la Joie et le drapeau européen soient présents aux JO de 2024, au côté des drapeaux nationaux ». Cela nous rappelle l’intronisation du 14 mai… Macron vient d’ailleurs de reconnaître officiellement, pour la France, les symboles européens (le drapeau, la devise – unie dans la diversité – l’euro, et l’hymne à la joie de Beethoven)

C’est le bon moment pour réussir la refondation européenne, avant les élections de 2019. On ne peut plus attendre encore.

Quelle Europe en 2024 ?

- démocratie et liberté doivent être le socle.

- une Europe moins technocratique, plus simple, plus efficace, protectrice aussi, avec le Marché unique, et sanctionnant toute pratique déloyale

- il faudra réformer les institutions : ramener la Commission européenne à 15 membres, pas 28 : c’est ingérable

- cette Union doit s’ouvrir aux Balkans afin qu’ils n’aillent pas vers la Turquie, ou la Russie, qui sont fort peu démocratiques.

- le Brexit : des discussions sont en cours. Mais rien sur l’avenir de l’UE que je souhaite. Et je n’imagine pas que le Royaume-Uni n’ait pas une « place » dans cette Europe. Acceptons aussi ces différences multiples.

Je pense également à Robert Schuman, et son célèbre discours du 9 mai 1950 : « l’Europe n’a pas été faite, et nous avons eu la guerre ».

Prenons le risque de l’audace pour notre avenir.

Je félicite la Chancelière Angela Merkel pour sa réélection. Nous partageons les mêmes valeurs sur l’Europe. Je sais qu’elle saura réagir face à ceux qui ont voté pour le repli et la haine (l’AfD a fait 12,6% des voix).

Sur tous les sujets que j’ai évoqués, nous pouvons lancer un axe franco-allemand fort, du droit des affaires au droit des pays.

Je propose que nous signions le 22 janvier 2018 un nouveau Traité de l’Elysée pour le 55ème anniversaire de sa signature (22/01/2963).

Dès demain, je serai avec le président du Conseil italien, puis j’irai voir ou revoir chacun des chefs d’Etat ou de gouvernement (j’en ai déjà vu 22).

Le temps de la France muette est terminé.

Il faut lancer un groupe pour la refondation européenne, avec des parlementaires, des associations, des autres pays européens

Et de conclure

Voici le cap que je voulais tracer ce jour : rendre l’Europe aux Européens.

Nous devons redonner l’ambition à cette Europe qui depuis 70 ans a tourné le dos à la guerre, lorsque le fanatisme et le nationalisme avaient pris le dessus, balafrant l’histoire des Européens. Cet obscurantisme se réveille un peu partout en Europe. Je le dis à tous les dirigeants européens : « vous n’avez pas le choix ». Ce choix, c’est l’Europe unie et forte.

Cette ambition, ce sursaut de nos consciences, nous devons les porter maintenant, tout de suite.

L’Europe a besoin de courage, pas d’inertie.

Gare aux bégaiements de l’Histoire.

Agissons par et pour la jeunesse européenne.

Commentaires et réactions

Les miens d’abord.

Lorsque l’on croit à l’Europe et à la nécessité impérieuse de son développement pour nos valeurs démocratiques, notre prospérité et notre sécurité, on ne peut qu’applaudir des deux mains par un tel discours et des propositions bien pensées, audacieuses, et qui forcent le débat, même avec ceux qui ne le voulaient pas, ou plus. Ses propos sont francs, décapants, même. Il était temps. L’Europe s’endormait et le nationalisme prospérait. Un discours ne fait pas tout, mais il réveille les consciences, redonne de l’espoir.

Sur le fond, Macron joue habilement sur deux tableaux, l’approfondissement de l’Union, et l’amélioration de tout ce qui ne marche pas. Et il n’hésite pas à bousculer les habitudes, à transgresser les codes, étant clairement pour une Europe à deux (voire plus) vitesses, pour avancer et convaincre les autres, et même pour une « locomotive » à…deux, le fameux socle franco-allemand.

Et, premier miracle, ça marche !

Car j’ai pu observer dans les media de la surprise, beaucoup d’éloges (si, si, et même jusqu’à Valeurs Actuelles, qui n’est pourtant pas un militant acharné de l’Europe !), de l’admiration parfois, mais aussi du scepticisme parfois face à des propositions si « audacieuses », mais pas d’attaques fortes sur le fond ni sur la méthode. Côté classe politique, les réactions reflètent évidemment le positionnement idéologique : ça va de l’étonnement, de la sidération ou du rejet en bloc de ces atteintes à la « souveraineté nationale », refrain bien connu et entendu depuis longtemps, quelque soient les propositions, d’ailleurs. C’est vrai que l’initiative de Macron est d’autant plus courageuse et audacieuse qu’il sort d’une campagne présidentielle où –et c’est très préoccupant- 8 candidats à cette présidentielle sur 11 étaient eurosceptiques ou franchement europhobes, 2 étaient euro-tièdes (Fillon / Hamon) et un seul européen convaincu, Macron, bien sûr. Ce qui ne veut pas dire « euro-béat », et ses critiques justes sur l’actuel fonctionnement de l’Europe le prouvent. Je souligne ce point important, car maintenant lorsque l’on se déclare pro européen, on est souvent taxé d’être « euro béat », ou « euro-naïf » !

Quelle que soit la suite réservée à cette « feuille de route », Macron aura eu l’immense mérite de renverser la table et de bousculer le discours ambiant et quasi unilatéral consistant à dénigrer systématiquement l’Europe, responsable de tous les problèmes. Cela fait vraiment longtemps (voire jamais ?) que l’on n’avait pas entendu ceci (morceaux choisis) : « Nous ne pouvons pas nous permettre de garder les mêmes habitudes, les mêmes politiques, le même vocabulaire, les mêmes budgets. Nous ne pouvons pas davantage choisir la voie du repli national, qui serait un naufrage collectif. Nous ne pouvons pas nous laisser intimider par l’illusion du repli. Et c’est en refusant ce mensonge que nous serons à la hauteur de notre époque, de son urgence, de sa gravité ».

Bravo ! Tout est dit ! Alors, « Macron : Miracle ou Mirage ? », pour reprendre le titre du dernier livre de Pierre-André Taguieff.

Les réactions européennes sont plutôt bonnes : Jean-Claude Juncker est pas mal en phase avec Macron, Madame Merkel aussi, elle a très vite déclaré son total consensus avec Macron, même s’il faudra « voir les détails » (contrairement à ce qu’a déclaré intempestivement Laurent Wauquiez à LCI, et ce malgré la démonstration contraire du journaliste lui présentant la dépêche officielle ! ! ). Madame Merkel a même donné son accord pour réviser le traité de l’Elysée, qui fêtera ses 55 ans le 22 janvier 2018. Pour Michael Stübgen, porte parole de la CDU au Bundestag, « la France redevient enfin un acteur politique sur la scène européenne » ; la CDU a approuvé la vision de Macron « pour une Europe plus forte et qui va de l’avant » ; accord total des Verts au Bundestag, « pour une Europe solidaire ». Par contre, le FDP ( les Libéraux ) est clairement contre, son président Christian Lindner refuse un Fonds monétaire européen et un budget spécifique de la zone euro, et encore moins qu’un tel budget permette des transferts « automatiques ». Pour lui la part de l’Allemagne dans ce budget est de plus de 60 milliards d’euros, et « il irait à la France pour ses dépenses publiques ou à l’Italie pour réparer les erreurs de Sylvio Berlusconi ». Ndlr : vous avez dit solidarité ? C’est fâcheux, car A.Merkel devra gouverner avec les Libéraux et les Verts…

Mais d’autres membres du FDP, plus nuancés, sont pour un mécanisme de soutien aux réformes mises en œuvre par les Etats membres. C’est du donnant-donnant, en quelque sorte ! Si nous nous réformons, nous serons aidés. A bon entendeur…En fait, j’y vois là plus un mécanisme de stabilité renforcé qu’un projet de budget commun souhaité par Macron.

Mêmes divergences sur l’Europe sociale, par exemple l’harmonisation des salaires ; c’est oui pour les Verts, et non pour les Libéraux ! Et ça s’inverse sur l’Europe de la Défense : oui pour la CDU et le FDP pour avoir une politique d’armement commun et une augmentation des dépenses d’armement, et non catégorique des Verts !

Mais madame Merkel a beaucoup d’expérience et du doigté pour réussir un gouvernement de coalition efficace. Et nul doute qu’Emmanuel Macron continuera à plaider son dossier auprès de ses collègues, et pas seulement dans les cénacles officiels comme les Conseils européens. Pour faire avancer l’Europe, et notamment la zone euro, on a trop besoin de ce tandem franco-allemand, jadis efficace à l’époque Kohl / Mitterrand ( Maastricht ; l’euro). Ils peuvent impulser une dynamique.

Dès le sommet de Tallinn (Estonie) du 28 septembre, Macron en a profité pour plaider sa cause. Donald Tusk, le président du Conseil européen, a été chargé d’élaborer un programme concret de mesures à prendre d’ici 2018 :coopération accrue en matière de défense ; approfondissement de l’UEM et finalisation de l’Union bancaire ; préparation du sommet du partenariat oriental. Et même si D. Tusk a déclaré « Pas d’Europe à la carte », il s’est empressé de rajouter : « mais si nous ne sommes pas en mesure de nous mettre d’accord, nous devrions quand même avancer, avec une réflexion sur l’avenir ». Et cela c’est assez nouveau, non ? Même si, de fait, l’Union est déjà à la carte, il est rare qu’on l’envisage en postulat de départ. Déjà un « effet Macron » ?

Le Parlement européen vient également d’inscrire au programme de sa première session plénière d’automne le thème « Réflexions sur l’avenir de l’Europe ».

La seule petite fausse note à ce jour est un twitt de la présidente de la Lituanie, madame Dalia Grybauskaite, très sceptique et contre les « mirages du désert ».

Les débats et processus sont enclenchés, on se doute bien que la route sera longue, sinueuse et pentue mais il reste le courage, la foi et la détermination.

Macron confirmera j’espère, pour son propre compte, la célèbre formule de Jean Monnet : « Je ne suis pas optimiste, je suis déterminé ». Il a commencé à « faire le job » pour relancer la mécanique Europe, il a marqué les esprits par de superbes discours (Athènes ; Sorbonne ) lyriques et oniriques. Il a encore enfoncé le clou sur ses idées au Conseil européen des 19 et 20 octobre. Tant mieux. C’est le retour de la France sur la scène européenne. Son grand nombre de propositions, parfois très optimistes, vont chambouler le débat dans les capitales et les instances européennes. Il ne reste plus qu’à espérer, en ces temps de populisme aggravé, que ses discours se transformeront vraiment en actes et ne resteront pas au stade de « Paroles, Paroles, Paroles », ce joli refrain de Dalida.