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Vous consultez les archives de L’Euro-blog d’Alain Malégarie pour le mois avril, 2018.

Du rififi à la Commission européenne ?

10 avril 2018

La tempête enfle au sujet de la nomination douteuse, par Jean-Claude JUNCKER, président de la Commission, de son ancien chef de cabinet au poste prestigieux de Secrétaire général de la Commission européenne, l’allemand Martin SELMAYR. A 13 mois des élections européennes, on n’avait vraiment pas besoin de cela !

Rappel des faits.

Martin SELMAYR, chef de cabinet de Jean-Claude JUNCKER, a donc été promu Secrétaire général de la Commission européenne (un poste-clé de l’Exécutif européen) en quelques minutes (!), le 21 février 2018, sans respecter les procédures réglementaires. Le poste de secrétaire général n’a même pas été publié ! Malgré les nombreuses réactions et questions posées, la Commission, depuis février, s’est enfermée dans un mutisme ou un déni, puis a réaffirmé le 25 mars, par la voix de son Commissaire au budget OETTINGER, que la procédure était parfaitement régulière ! Je précise que la personnalité de M. SELMAYR n’est nullement en cause, il est même reconnu partout pour ses grandes compétences et une réelle efficacité, requises pour un poste aussi redoutable qu’important.

Mais avec ce couac procédural, on ne peut s’empêcher de faire un parallèle avec la Commission Jacques SANTER (1995-1999), un Luxembourgeois, déjà !! Le Parlement européen avait refusé à l’époque de donner quitus à la Commission pour l’exercice budgétaire de 1996 puis pour « mauvaise gestion budgétaire » en 1998. Ensuite, cerise sur le gâteau, la Commissaire française Edith CRESSON et le Commissaire espagnol Manuel MARIN furent accusés de favoritisme et de fraude. Trop, c’est trop ! La Commission SANTER avait donc collectivement démissionné en 1999, évitant ainsi une motion de censure quasi certaine de la part du Parlement européen. Depuis 1957 et jusqu’à aujourd’hui, ce fut d’ailleurs le seul scandale de la Commission. Ce serait navrant, à un an des élections européennes, qu’il y en ait un deuxième ! Alors que la Commission, gardienne des traités, est plutôt exemplaire et rigoureuse à la différence des Chefs d’Etat et de Gouvernement, dont les scandales pour corruption ou autre sont fréquents, en France et ailleurs !

Le problème est que Juncker a traité cette question pour le moins, à la légère, «  Cessons les enfantillages », a-t-il dit, comme réponse aux interrogations légitimes des eurodéputés. Jean-Claude JUNCKER finit très mal son mandat ! Un peu court, « jeune  homme » ! Pire ! Il a menacé de démissionner si Martin SELMAYR, proprement (et promptement !!) nommé par lui au poste capital de secrétaire général de la Commission, était poussé à quitter son poste.

Petits chantages et propos infantiles, s’il en est, Monsieur le Président.

La seule question que l’on se pose ici ou là, et à laquelle il convient de répondre est : la Commission a-t-elle oui ou non respecté la procédure et les règles de droit pour cette nomination importante ? La réponse est clairement « non » ! Pas d’appel d’offres public, pas de présélection avec un oral devant un panel ni de classement par un comité consultatif des nominations (le CCN). Pas de contrôle des compétences par un consultant extérieur donc neutre (Mercuri Urval) ni de retour devant le CCN ! Alors que cette (lourde) procédure est obligatoire pour tous les postes de direction ! A fortiori, pour celui de Secrétaire général,  poste stratégique et incontournable, à la fois administratif et politique, aucun dossier ne passant sans sa validation ! Et ce n’est que le 21 février que cette nomination a été « annoncée » aux 28 commissaires, qui l’ont « validée » à l’unanimité ! Au total, ce sont les articles 4 et 11 des statuts de la Commission qui n’ont pas été respectés.

Le mieux, pour sauver la face, serait de rouvrir le poste du Secrétaire général. Et de respecter les délais et procédures… Monsieur SELMAYR pourrait même se représenter. Mais non, le président de la Commission s’entête…

Du coup, le Parlement européen (la voix des citoyens européens) s’est saisi de ce dossier délicat via la commission du contrôle budgétaire, et a adressé 134 questions à la Commission européenne pour cette affaire. Pas de réponse. Du coup, le groupe des eurodéputés Verts réclame qu’une enquête sur la nomination soit diligentée.

Cette lamentable affaire arrive à un moment crucial pour le projet européen, pour sa refondation. Et la Commission se doit de rester exemplaire, de ne pas faire comme les Etats membres…

La Commission honore, depuis 1957, l’UE par sa vigilance, sa compétence, sa transparence, son rôle statutaire de « gardienne des traités » et de contrôle du bon fonctionnement de l’UE et de l’application des décisions prises par le Conseil européen et le Parlement.

Ce serait vraiment navrant qu’elle gâche une telle image (que les politiciens eurosceptiques et europhobes s’emploient régulièrement à salir) sur cette malheureuse affaire.

La non-réponse, une certaine arrogance de Jean-Claude Juncker, qui avait pourtant bien commencé son mandat en 2014 (sur les programmes d’investissement massifs pour la relance de l’Europe), même si son action est devenue ensuite beaucoup plus modeste et trop conciliante à l’égard des Chefs d’Etat et de gouvernement, pourrait mal finir, s’il persistait dans le silence et le déni.

Car le Parlement européen dispose d’une arme majeure, qu’il a failli déjà utiliser une fois dans son histoire : c’est de voter une motion de censure contre la Commission, laquelle doit démissionner en bloc. Juncker veut-il finir comme Santer ? Ironie de l’histoire, ce serait encore un Luxembourgeois !

La Commission contrôle les gouvernements sur certains points (le budget, le respect des règles de déficit, la concurrence loyale entre Etats, etc). Elle ne peut reproduire dans ses actes les « magouilles » que font régulièrement, dans leurs nominations internes, les Etats. Là, Jean-Claude JUNCKER raisonne d’ailleurs en chef d’Etat qu’il a longtemps été. Arrogance, déni, opacité. La Commission, et avec elle toute l’Union méritent mieux que cela. Il ne faut pas reproduire les turpitudes des Etats !! Elle doit, elle, rester irréprochable, sinon les dirigeants eurosceptiques voire europhobes, masquant leurs propres turpitudes, vont profiter de l’aubaine, pour faire de la Commission, à nouveau, un bouc émissaire ! Espérons que la raison l’emportera…

La balle est donc dans le camp de Jean-Claude Juncker.

Sinon, c’est la Commission qui pourrait être emportée !!

Gare au « Selmayrgate » !!

Au moment où, pour la première fois de l’histoire de l’Union européenne, qui a soixante ans, une consultation majeure des citoyens dans tous les pays (initiative française !), va démarrer très bientôt avec, partout, des échanges et débats libres à travers des milliers de « consultations citoyennes », un des trois piliers majeurs de tout l’édifice institutionnel européen doit rester irréprochable.

Monsieur Juncker, SVP, ne prêtez pas le flanc à la critique ! Ne donnez pas aux eurosceptiques et autres europhobes nationalistes de si faciles prétextes pour être le bouc émissaire idéal. Les élections législatives européennes du 26 mai 2019 seront cruciales pour sécuriser notre avenir face à la montée des populismes et des nationalismes ( Trump, Poutine, Xi-Jinping, pour ne citer que les « gros » qui, ce n’est nullement un hasard, se réarment fort, mais il y en a tant d’autres tels que l’Inde, le Japon, la Turquie, voire même chez nous Européens, comme la Pologne et la Hongrie, en pleines dérives anti-démocratiques…). Ne gâchez pas nos atouts et notre potentiel pour des questions d’amour-propre…L’Histoire vous jugera…