2020 : à quand une Europe enfin plus forte sur la scène internationale ?
03 janvier 2020Cher.e.s lecteurs,
Mon euroblog entame, en ce début d’année 2020, sa treizième année. Il a grandi pour vous, et surtout avec vous, grâce à vos commentaires, vos avis, vos souhaits.
Je vous en remercie très sincèrement.
2020 sera une année importante pour l’Union européenne et pour le monde, monde rempli de tensions géopolitiques, de concurrence commerciale croissante, et d’atteintes aux Droits de l’homme, y compris dans quelques Etats membres de l’Union.
2020 sera donc aussi une année de défis et de forts enjeux. Pour nous Européens, il s’agira de prendre toute notre place dans ce monde turbulent et incertain face à la première (encore) puissance mondiale, les Etats-Unis, et surtout face à la future première puissance mondiale, la Chine.
L’Union est la première puissance commerciale du monde, mais reste un « nain politique », selon la formule – déjà ancienne, mais hélas encore actuelle – de Jacques DELORS. Un nain politique, par la faute de ses dirigeants politiques qui, malgré de belles paroles, de belles promesses, ne parviennent pas à s’unir vraiment, sur un plan politique intégré, fédéral, qui permettrait, entre autre, une vraie Europe de la Défense, et une force géopolitique qui parlerait d’une seule voix, unie et solidaire, dans tous les domaines.
Ne pas le faire est irresponsable, le XXème siècle a connu, faute d’Europe intégrée, la domination américaine sur le plan géopolitique. Trump veut toujours casser, démanteler, l’Europe, car il la craint sur le plan économique. Il suffit d’écouter son affidé Pompéo, et ses charges récurrentes contre nous. Dirigeants européens, réveillez vous, bon sang ! Le XXIème siècle sera, sans Europe politique forte, dominé par l’Asie, avec la Chine en premier plan, mais aussi l’Inde, l’Indonésie…
Les Européens pourraient aussi s’emparer d’un autre défi majeur, celui du climat et de ses effets environnementaux, avec des conséquences sur la survie même, à long terme, de l’espèce humaine. Heureusement, la toute nouvelle présidente de la Commission européenne a fait de ce sujet la priorité absolue de la mandature 2019-2024, en lien avec le nouveau Parlement européen, sur la même longueur d’ondes.
Ce sera le « Green Deal » européen, ou Pacte Vert, avec pour ambition de faire de l’Europe le premier continent neutre en carbone au monde d’ici à 2050. L’Europe est déjà plus « vertueuse » que les autres continents de la planète, à commencer par l’Amérique et l’Asie, nous avons donc, là, une petite avance. Exploitons-la !
Les cinq autres priorités de la Commission seront le développement de l’ère du numérique ; une économie au service des personnes ; la promotion du mode de vie européen ; le renforcement de la place de l’Europe sur la scène internationale ; et un nouvel élan pour la démocratie européenne.
Ces enjeux sont essentiels. Reste à savoir si les chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union, qui définissent les grandes orientations et « mènent ensuite le bal », sauront mettre en œuvre ces six défis vitaux, en y consacrant un budget européen décent, adossé aux budgets nationaux.
Aux citoyens européens de s’emparer de ces sujets, dans les débats politiques, de les relayer, de les imposer par leurs votes, dans les politiques publiques. C’est essentiel.
Un autre défi pour l’Europe sera l’après-Brexit. L’Union perd un de ses principaux membres, un membre majeur, un contributeur net, un partenaire important quoiqu’on en dise. Mais là, je suis de moins en moins inquiet, car je pressens une énorme mascarade…Certes, le Royaume Désuni quittera bien l’Union le 31 janvier, en vertu de l’article 50 du traité de l’Union européenne, mais le mot “quitter” me semble de plus en plus à…géométrie variable, même avec un Boris Johnson renforcé par sa nette victoire aux élections législatives du 12 décembre 2019. Car l’ère de la real politique est arrivée, après celle de la tension politique, voire idéologique, du côté britannique. Quoi de plus normal, d’ailleurs, quand on sait que les échanges commerciaux entre le Royaume-uni et l’UE représentent plus de 390 milliards € par an ! Et Thierry BRETON, Commissaire européen en charge du marché intérieur, a prévenu : ” Pour accéder au marché unique européen, les Britanniques devront respecter toutes nos règles, en particulier les normes environnementales, sociales et sanitaires, ainsi que le contrôle des aides d’Etat “.
Mais s’il n’y avait pas d’accord, nos relations commerciales seraient forcément compliquées : droits de douane, normes environnementales et sanitaires différentes…Ces contraintes entraîneraient forcément des surcoûts qui pèseraient sur l’économie britannique mais aussi européenne…
2020 ne sera pas tragique. Car le 31 janvier, en fait, le RU va quitter les institutions européennes, point barre. Donc, jusqu’au 31/12/2020, il devra encore appliquer à la lettre les règles européennes, cette année sera donc une période de transition tant qu’un accord commercial global de libre-échange n’aura pas été signé. Ce qui fait dire à nombre d’observateurs éclairés, et aux négociateurs européens (avec à leur tête toujours Michel BARNIER) que ce délai de onze mois (les négociations commençant le 1ier février) sera très court, pour ne pas dire impossible…Car cet accord comprendra environ 600 micro accords, secteur par secteur !..Pour exemple, les négociations pour le CETA (accord commercial UE/Canada) ont duré…sept ans !!
Pour couronner le tout, le Royaume-Uni va également s’affaiblir considérablement sur le plan intérieur et politique, par désunion voire scission de certains de ses membres. D’où l’expression “Royaume-Désuni”, qui pourrait bien devenir réalité. A commencer par l’Ecosse, qui veut absolument rester dans l’UE, et qui souhaite tenter à nouveau un referendum pour l’indépendance; mais aussi l’Irlande du nord, qui ne veut pas couper les liens avec l’Eire, et même le Pays de Galles, qui commence à son tour à réfléchir sur son indépendance. Si ces trois pays faisaient sécession, ou même un ou deux seulement, l’implosion du Royaume-Uni sera inéluctable.
Mais nous n’en sommes pas encore là et en ce début 2020, après un accord préalable laborieusement négocié (plus de deux ans!), il s’agit désormais d’engager des négociations capitales pour préparer nos relations futures, commerciales notamment, et sauvegarder, côté britannique, nombre de partenariats, ce qui sera excellent aussi pour nous. Et le paradoxe c’est que c’est Boris Johnson qui, malgré sa posture antérieure, prévoit dores et déjà de garder nombre de ses partenariats avec l’UE, en rajoutant même des secteurs dans l’accord qu’il a renégocié : il veut désormais rester dans l’Agence européenne du médicament, dans l’Agence européenne de défense (!), dans les programmes de l’Europe spatiale, dont il a même augmenté sa part de financement dans le budget ! Alors, messieurs les Anglais, vous avez dit Brexit,…ou mascarade ?
Sauf nouveau coup de théâtre, tout cela semble de bon augure pour limiter la casse. Pour eux surtout, mais aussi pour nous. Prudent, Charles MICHEL, le nouveau président du Conseil européen, a toutefois prévenu que ” des règles de jeu équitables demeurent une nécessité pour toute relation future”.
Mais si je comprends bien, on divorce…mais on reste ensemble pour les enfants ! Il est vrai qu’on a trop d’intérêts partagés, et que chacun doit être réaliste et responsable dans un monde tempétueux qui ne nous veut pas toujours du bien. Tant mieux pour tous si les Britanniques l’ont compris, et si, plus que jamais, ils resteront “un pied dehors, un pied dedans”. On a juste inversé les pieds !
J’aurai bien sûr l’occasion de revenir, tout au long de l’année 2020, sur toutes ces problématiques, Brexit et autres sujets, et sur les progrès – ou non – accomplis pour que notre Europe soit forte et visible dans le concert mondial.
En vous remerciant encore pour votre fidélité, je vous dis à très bientôt et vous adresse, pour vous et vos proches, mes vœux les plus chaleureux pour une belle et heureuse année 2020, pleine de santé, de joie, de succès.
Fidèlement et Européenement votre.