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Espoirs européens et inquiétude française

Cher(e)s ami(e)s internautes,

Pour finir l’année en beauté, je vous propose de partager avec vous quelques questions et analyses sur la France et l’Europe, en cette fin d’année 2014 si dense, si compliquée aussi : la France est-elle réformable ? Deviendra-t-elle enfin compatible avec le projet européen ou sombrera-t-elle dans un isolement chaotique ? Le Plan Juncker, qui propose de changer – enfin - la donne après 10 ans d’immobilisme de la Commission Barroso et le retour catastrophique d’un intergouvernementalisme cynique, impuissant et arrogant, est-il crédible, suffisant, pour sauver les Européens de leurs démons nationalistes ?

Mais avant de commencer, je vous dois quelques explications, car voici quatre mois que je ne vous ai pas écrit de « billet ». Rassurez-vous, je vais bien , malgré une campagne électorale dure, et des résultats catastrophiques qui discréditent un peu plus la France dans le concert européen…Mais je n’ai pas renoncé au plaisir d’échanger avec vous, d’analyser la situation économique, de critiquer (souvent !), de proposer (parfois).

Depuis les élections législatives européennes du 25 mai 2014, où je fus tête de liste du Parti Fédéraliste Européen pour la circonscription Sud-Est, j’ai été très occupé. Comme il était prévu, j’ai créé une section régionale du PFE, dénommée, « Parti fédéraliste européen Rhône-Alpes-Auvergne ». Ce petit parti jeune (créé en 2011), présent dans 18 pays de l’UE, a beaucoup de propositions concrètes et réalistes pour sortir de cette Europe dirigée par des Etats divisés, morcelés, égoïstes, donc impuissants à affronter les enjeux et défis du monde au XXIème siècle. Il reste à convaincre les Français, notamment, que le fédéralisme est la seule solution pour sauver le projet européen, les acquis depuis 60 ans, nos valeurs de démocratie, de liberté, de solidarité, notre monnaie unique, notre prospérité. Le PFE-France vient de tenir son assemblée générale et a profondément renouvelé ses instances et ses projets. Outre la section régionale, je suis en charge du projet politique de ce parti. Ce parti a naturellement vocation à être présent à toutes les élections. Il s’efforcera donc de trouver les ressources humaines et financières pour participer aux élections départementales et régionales de 2015.

Par ailleurs, je souhaite également, avant de commencer mon dernier euroblog de l’année 2014, rendre hommage à Jacques Barrot qui nous a quitté le 3 décembre, à l’âge de 77 ans. Jacques Barrot, chrétien social, humaniste, fut aussi un européen convaincu. Ministre français de 1978 à 1981, puis de 1995 à 1997, il fut aussi un commissaire européen sous la première présidence de José Manuel Barroso. Il fut commissaire à la politique régionale en 2004, aux transports de 2004 à 2008, et à la justice en 2008-2009. Jacques Barrot était un homme d’Etat, un homme de dialogue, de convictions. Avec une vraie foi européenne, sincère, honnête. Ce n’est pas si fréquent dans la médiocratie ambiante du personnel politique. D’ailleurs Jean-Claude Juncker, l’actuel président de la Commission, qui l’a bien connu, lui a rendu un émouvant hommage : « la France vient de perdre un grand monsieur, et je perds un ami ».

I – la France, ce vieux pays irréformable…

Je voudrais d’entrée de jeu, tordre le cou à une imposture : le mot « austérité ». Austérité, pour la France ? Mais quelle austérité ? Parlez-moi d’inégalité, d’injustice, de précarité, de passe-droit, de prébendes, mais pas de « politique d’austérité » !

Parfois les mots employés ne veulent plus rien dire. Les extrémistes de droite ou de gauche, de Le Pen à Mélenchon ou Besancenot, les frondeurs du PS, et tant de commentateurs hystériques et autres économistes outranciers ne cessent de répéter à l’encan, depuis des mois, voire des années, que les dirigeants de la France, cruels et cyniques, mènent des politiques économiques austéritaires. Ce mot maudit fait florès. Et cela marche, malheureusement ! Tapez le mot sur la toile et vous verrez le déferlement de commentaires ! Car tous ces gens-là parlent d’austérité dans un pays qui, en fait, triche avec les mots, les actes et finalement avec lui-même.

Que l’on me comprenne bien, surtout. Je ne suis pas en train de vous dire qu’en France tout va bien sur le plan économique et social. C’est même tout le contraire. Avec 8 millions de précaires, c’est-à-dire vivant avec moins de 975 € par mois, le même nombre qu’en Allemagne, sauf qu’en Allemagne il y a 20 millions d’habitants en plus…De même, la France compte 130.000 SDF, dont 31.000 enfants. Le chiffre des bénéficiaires de minima sociaux a bondi de 25%… Mais ne nous trompons pas sur les causes de cette précarité en France. Les causes, c’est un chômage de masse depuis les années 80, générant une précarité accrue depuis la crise de 2008/2009, conjuguée à des inégalités structurelles entre territoires que les fonds européens ont peu réduit. Mais on confond la cause et l’effet : les 10,6% de chômage en France, toutes catégories A, B et C confondues (11,4% en zone euro, dû essentiellement aux pays latins, dont la France), ne sont nullement dus à des « politiques d’austérité », mais à un manque de compétitivité et d’innovation ; à des économies de rente et des corporatismes hallucinants (qui durent parfois depuis deux siècles) ; à une rigidité du marché du travail qui décourage les ¾ des chefs d’entreprise, petits ou grands, à embaucher ; à des effets de seuil (à l’embauche ou à la représentation syndicale) savamment entretenus, à une fiscalité sur les entreprises totalement débile, inique et ravageuse ; à une frilosité des banques qui refusent encore trop, malgré l’intelligence de la BCE et de son président, de prêter aux entreprises ; à un manque de courage des chefs d’entreprise aussi, parfois ; à une confiance relative et fluctuante des investisseurs étrangers sans lesquels chaque pays, désormais dépendant, n’est plus rien, n’en déplaise aux nationalistes qui haïssent leur pays au point de le détruire en le refermant sur lui-même !

J’ajouterai le piètre niveau des exportations françaises que la baisse de l’euro, on s’en apercevra d’ici plusieurs mois, n’améliorera qu’à la marge, et le coût exorbitant de notre dette, malgré une confiance (encore !) de nos prêteurs mondiaux qui nous prêtent à 1% sur 10 ans, c’est-à-dire quasi gratuitement, des sommes colossales (100 milliards d’euros par an) pour rembourser nos « vieilles » dettes qui ont commencé en 1976 ! Faute de croissance, faute d’exportation, on emprunte donc pour rembourser les emprunts, cela peut s’apparenter à la chaîne de PONZI, vous ne trouvez pas ? Vous savez, cet escroc génial italien qui inspirera l’escroquerie du siècle (à ce jour) de l’américain Bernard MADOFF.

Lorsque l’on ne produit pas assez, emprunter pour rembourser les emprunts, et pour garder aussi un certain train de vie à la population, c’est la seule voie pour acheter la paix sociale, sans augmenter encore les impôts jusqu’à des niveaux indécents.

C’est sympa, louable presque, socialement parlant, mais suicidaire car du coup le pays s’enferme dans un piège total : sans croissance, endetté, il n’a aucune marge de manœuvre pour la recherche et le développement. Et pas d’autre voie que de continuer à emprunter pour assurer le fonctionnement régalien de l’Etat (police, armée, santé).

Donc les maux de notre pays ne sont en rien les effets d’une politique d’austérité. Là, on est plutôt dans l’idéologie, de l’extrême-gauche à l’extrême-droite ! Le mot est à la mode, alors qu’on en est encore très loin. Nous commençons à peine à payer 20 ans d’inertie, à l’abri de l’euro. Sauf que nous sommes concurrencés par des voisins qui eux ont continué à se réformer, à se remettre en cause, à s’adapter à la mutualisation accélérée du monde.

Quelle austérité, dans un pays considéré par beaucoup de ses voisins européens comme un pays de « cocagne », un pays qui ne respecte jamais ses engagements européens en terme de déficit et de dette, en se mentant en permanence, qui erre de déficit en déficit, de délais en délais, délais d’ailleurs jamais tenus, avec constance et cynisme, pour perpétuer la politique sans fin du carnet de chèques. Un pays qui confond la politique avec l’économie, le rêve avec la réalité. Que la France soit en croissance ou non, elle indemnise ses chômeurs, rembourse les soins de santé et garde son train de vie dans tous les domaines. Couper dans la moindre dépense, en France, est quasiment impossible.

La dette et le déficit ont démarré en 1976, pour ne plus jamais s’arrêter, et pour décupler d’année en année, dans un tourbillon effrayant qui donne le tournis face aux chiffres affolants. Chirac a fait enfler la dette comme jamais, Sarkozy a fait mieux, ou plutôt pire, en la doublant. Elle était déjà à 900 milliards d’euros en 2007, il l’a laissée à 1.800 milliards en 2012. Et ces gens-là voudraient se représenter ! C’est frappant d’ailleurs qu’ils ne se remettent jamais en question, qu’ils ne dressent jamais un bilan de leurs actes ! Et François Hollande continue à acheter la paix sociale et à nous conserver, quoiqu’on en dise, un niveau de vie que notre économie et notre faible compétitivité ne permettent plus. Et que les générations futures devront rembourser. En 2,5 ans, il a augmenté notre dette de 232, en la passant de 1800 milliards à 2.032 milliards d’euros. Il a à peine ralenti sa hausse, et il faudra donc continuer à emprunter plus de 100 milliards d’euros par an pour boucler nos fins de mois. Et on continue à nous seriner qu’on est en austérité ! L’austérité, c’est pour ceux qui paient des impôts ! L’austérité, c’est pour tous les chômeurs, notamment les « longues durées » de plus de deux ans, qui explosent, les exclus du système, victimes de politiques laxistes qui ont ruiné le pays en l’endettant, ce qui exclut désormais durablement (sauf si l’on passait enfin à l’Europe fédérale, qui mutualiserait les dettes) toute marge de manœuvre financière. De toute cela, on en parle jamais, ou trop peu ; quant tout va mal, nos dirigeants préfèrent s’enfermer dans l’émotionnel, le compassionnel et le commémoratif. Et j’oubliais ! Le culte de la Nation, éternelle, « nous sommes un grand pays, qui a plein d’atouts, etc, etc,  ». Ecoutez les vœux présidentiels, et comparez avec ces lignes, pour le « copié-collé ». Heureusement qu’on aura encore des tas de commémorations d’ici le 11 novembre 2O18. Une par jour, ce serait l’idéal ! c’est quand même plus facile que des résultats économiques…

En attendant, les promesses, non tenues continuent. La France a promis de ramener, comme la quasi-totalité des pays de l’UE, le déficit à 3%. Pour 2014, elle avait encore promis 3,8%. On finit l’année à … 4,4%. Et en 2015, on sera encore à 4,3%. On ne s’en sort pas. Même l’Italie est revenue en-dessous de 3%. La Grèce, l’Espagne et le Portugal ont mieux et plus vite réduit leur déficit, et relancent leur économie. La Grèce a renoué avec la croissance en 2014 (+0,6%). Même si ses taux d’intérêt pour ses emprunts, qui sont passés, depuis 2010, de 27% à 6%, grâce à la solidarité européenne, remontent un peu (à 7,1% sur 10 ans) en fin d’année.

Et la France, de gauche comme de droite, totalement réfractaire à l’économie et aux réformes, reste inerte, ne change rien, absolument rien, la culture de l’endettement et de la dépense à tout va chevillée au corps. Cela tient à notre génération actuelle de dirigeants qui continuent à dépenser ce que nous ne produisons plus, ou pas assez. Pour avoir la paix, ou penser l’avoir. Mais pourquoi donc ont-il si peu de courage, par rapport à leurs homologues européens ? Pourquoi ? Pour garder le pouvoir coûte que coûte, quitte à sacrifier encore un peu plus les générations futures, en leur laissant une dette énorme à absorber ? C’est vraiment idiot, car ils seront de toute façon, totalement balayés aux prochaines élections. Mais le pire est qu’ils n’y croient pas, attendant un retournement économique. Preuve qu’ils n’ont rien compris. Adeptes de la méthode Coué malgré des chutes de popularité spectaculaire. Qui sera un jour courageux, enfin, pour couper vraiment dans les dépenses publiques, et restaurer nos finances pour enfin rebondir et dégager des marges pour investir et créer des emplois, comme l’ont fait l’Allemagne et plusieurs pays nordiques et scandinaves ? Ce qui leur a permis, à eux, de sauver leur modèle économique et social. Quand feront-ils vraiment une politique de rigueur, forte et courte pour repartir ? Au lieu de faire semblant, en permanence, et d’enliser la France dans une glaciation économique, de 0 croissance, de 0 emploi et de 0 avenir. Il faut se rendre hélas à l’évidence.

La Grande-Bretagne est le malade politique de l’Europe, au point de vouloir la quitter, ou du moins de le proclamer… La France devient le malade économique de l’Europe, avec l’Italie, (qui fait plus de réformes, mais a une dette pire), en continuant à vivre au-dessus de ses moyens, et elle affole tous ses voisins qui craignent la contagion. La France est en train de devenir un sérieux problème pour l’économie de la zone euro, tellement interdépendante. C’est bien d’ailleurs ce qui affole les Allemands, et bien d’autres. Le poids économique de la France (deuxième de la zone €) est tel qu’il peut à lui seul entrainer la perte de confiance des prêteurs mondiaux pour l’UE… Ce qui devrait d’ailleurs rendre la France un peu plus responsable, et solidaire. Si l’on ne fait rien, la vraie crise est ainsi devant nous. L’austérité aussi, lorsque les prêteurs cesseront de remplir le carnet de chèque de la France.

La France décroche progressivement de tous les autres pays. Le gouvernement le sait très bien. Il commence enfin à l’avouer. Malgré les excellentes mesures de la BCE, qui va continuer à injecter des milliards dans l’économie(mais pas autant que les 13.000 milliards de $ aux Etats-Unis), malgré la baisse de l’euro, malgré des taux d’intérêts très faibles, chaque pays doit faire ses réformes structurelles, assouplir son marché du travail, alléger le matraquage fiscal, rendre de la compétitivité à l’économie par l’innovation et les investissements, rendre le système éducatif efficient, développer la formation et l’apprentissage. On sait tout cela depuis 20 ans, au moins. Et on ne fait rien depuis 20 ans, à part en parler tout le temps, à faire des rapports tout le temps, à diagnostiquer tout le temps. On ne compte plus les rapports de bon sens : rapport Camdessus, Gallois, Attali. Plan ceci, Plan cela. Mais ce pays est bloqué, crispé, encalminé dans ses discours politiques, ses clivages idéologiques permanents, l’irresponsabilité de l’opposition quelle qu’elle soit (aujourd’hui c’est la droite qui rejette tout, sans jamais rien proposer, sauf de reprendre le « pouvoir » pour le pouvoir). En 2017, ce sera au tour de « la gauche » (laquelle, au fait ?…) de pilonner, de bloquer, de rejeter. Ce sont des grands malades de l’addiction au pouvoir, dont l’attitude (sans parler des corrompus !..) fait prospérer le FN qui, lui, veut carrément la fin de la France par ses propositions mortifères et suicidaires.

Ce pays s’oppose à ses meilleurs partenaires européens, qui voulaient faire avancer l’Europe. Ce pays s’oppose même à l’intérieur, incapable, face à la mutation irréversible du monde, de faire un gouvernement d’union nationale face à la gravité de la situation. Ceux qui sont temporairement dans l’opposition veulent même détériorer ce qui marche ! Quand on entend un Sarkozy, aux affaires (sans jeu de mot ! ) depuis des décennies, dire qu’il « faudra sortir de Schengen et supprimer la moitié des compétences de l’Europe (lesquelles, au fait ? ), c’est affligeant, de telles âneries et démagogies lepénistes ! Comme si la France était seule à décider ! Ce climat de « guerre civile » permanent est grotesque, absurde et suicidaire. Madame Merkel a su gouverner avec les Verts. Elle sait à présent gouverner avec les socio-démocrates. Et ça marche… Et nous, entre deux rapports excellents qui ne sont jamais appliqués, nous nous querellons, et nous sommes en campagne électorale permanente, champions du « Yacafauquon ».

Il n’y a plus une seule année paisible pour travailler, réformer, sereinement ! Cette fois, on est vraiment au pied du mur. La France, avec des dirigeants de droite et de gauche, lâches et nuls en économie, et un clivage politique absurde, est la seule à ne pas faire ce qu’il faut. A ne pas appliquer les traités qu’elle a signés, et souvent inspirés ! Ce qui a fait dire à Madame Merkel : « tous les Etats membres doivent respecter totalement les règles du pacte de stabilité et de croissance. Les textes ne sont pas tombés du ciel ». Les générations futures vont le payer très cher, surtout si on est éjecté de l’Europe qui avance. Comment tous les autres pays pourraient garder une brebis galeuse ?

II – le tournant Macron ?…Espoir ou feu de paille ?

Je reproche souvent à l’UE d’agir trop peu et souvent trop tard, comme lors de la crise grecque où l’on a perdu deux ans (2009-2011) pour agir, car les intérêts nationaux s’entrechoquent, égoïstement.

Mais c’est plus grave lorsqu’un pays, la France, qui se targue d’être républicaine et « une et indivisible » a un mal fou à faire passer la moindre réforme, voire réformette.

Même quand la loi est votée ! 20% des lois, dix ans après leur adoption, sont toujours inapplicables pour la simple et bonne raison que… les décrets d’application n’ont pas été promulgués ! On est parfois hypocrite en abrogeant – de droit ou de fait – une loi votée : le CPE de Villepin, l’Ecotaxe de Hollande, votée à la quasi-unanimité à l’Assemblée nationale, et aussitôt enterrée. Des centaines de lois ont ainsi été « oubliées » par le Prince… Vive la démocratie parlementaire !

On recule dès que des pneus brûlent, ou que les routes sont bloquées. Idem pour la réforme de l’assurance-chômage, enterrée par Hollande. Idem pour les réformes des professions libérales. Depuis plus de 20 ans, on recule systématiquement, en France, devant tous les lobbies. La France s’est immobilisée peu à peu, enkystée dans ses peurs, dans ses replis.

Une question me hante souvent : mais comment donc font les autres peuples européens, pourtant culturellement si proches de nous ? Pourquoi chez eux les réformes passent ? Même celles qui sont « dures » ? Comment font-ils ?

Le résultat, année après année, révèle un décrochage croissant avec les Etats vertueux. La dépense publique de la France, hors intérêts sur la dette, excède de 12 points de PIB celui de l’Allemagne, et de 8 la moyenne de la zone € ! Elle représente 57% du PIB pour la France (Sarkozy l’avait déjà amené à 56,4%) contre 45% du PIB pour l’Allemagne. Et l’on s’étonne encore que l’Allemagne soit plus compétitive ? La dette de la France va terminer l’année 2014 à 2.032 milliards d’euros, soit 4,4% du PIB. Où est la baisse ? 2015 finira, avec la croissance anémique que nous aurons (entre 0,7 et 1%) avec une dette représentant … 4,3% du PIB. Donc une baisse de … 0,1%. Faut-il rire, ou pleurer ?

Le déficit budgétaire prévu par le gouvernement serait de 2,7% en … 2017 (soit enfin dans les clous de Maastricht). Prévision jugée optimiste par tous les économistes sérieux de droite, du centre et de gauche. Et je ne vous parle que du déficit. La dette, elle, continuera de grimper, inexorablement. Je pourrais égrener des chiffres ahurissants durant de pleines pages. Le déficit du commerce extérieur : 58 milliards en 2014. Les investissements : - 0,5%. 84% des embauches se font en … CDD. Pour des CDD de … quelques jours (si, si !) à quelques mois, le plus souvent. Avant les CDD étaient bien plus longs. Le chômage continuera inexorablement sa progression. Ce sera évidemment le cas de l’année 2015. En France, on ne crée pas d’emplois avec une faible croissance, en raison de tous nos problèmes structurels, mais aussi d’une démographie forte qui amène 100.000 jeunes de plus chaque année sur le marché du travail. En cherchant bien dans des tonnes de chiffres ou de bilans, j’ai quand même trouvé 2 bons chiffres : + 2,4% de créations d’entreprises en 2014, et un nombre de faillites d’entreprises en baisse de 7%.

Mais ces rares résultats ne compensent pas tous les clignotants en rouge. L’Allemagne est à 6% de chômage, et son budget est désormais, depuis 2014, en équilibre, c’est-à-dire avec 0 euro de déficit, quand le budget 2015 français, voté par la Représentation nationale, est à nouveau insincère, en déficit, et que l’on sait qu’il faudra trouver en fin d’année 2015, 100 milliards d’euros, c’est-à-dire par l’emprunt sur les marchés, ou l’impôt, ou les deux. Ce n’est pas moi qui le dit, c’est l’avis, très critique, du « Haut Conseil des Finances Publiques », une nouvelle instance ( !) créée par François Hollande. Cet avis rejoint l’avis réitéré, année après année (de Seguin à Migaud) par la très sérieuse (et neutre) Cour des Comptes. Faudra-t-il créer une 3ème instance indépendante ? Qui dira la même chose ? Le budget de la France est insincère dès le 1er jour où il est voté, et sans préjuger des aléas de la situation internationale, des chocs de conjoncture, de « pépins » exogènes tels la hausse des matières premières énergétiques ou la hausse des taux d’intérêts de nos prêteurs. Je rappelle à cet égard souvent dans mon blog que les seuls intérêts de la dette française (et pas son remboursement) coûtent 50 milliards d’euros par an (c’est le 2ème budget de l’Etat !), et qu’une hausse de 1% des taux d’intérêt l’augmenterait mécaniquement de quelques milliards…

Tout le monde sait que ce budget, comme les précédents depuis 20 ans, ne servira à rien (sauf à faire fonctionner le régalien, bien sûr) : il ne fait pas de réformes structurelles, ne prévoit pas d’investissements, ne respecte pas les équilibres des textes communautaires que nous avions imposé ( !!!) en terme de déficit et de dettes, reportant encore le retour aux équilibres (maxi 3% de déficit et 60% de dette par rapport au PIB). La Commission sortante a fermé les yeux (on ne tire pas sur l’ambulance). Elle a fait les gros yeux à la France et à deux autres pays (Italie et Belgique) mais difficile d’avoir un gros clash avec la seconde économie de la zone € (« too big to fail ». Elle a préféré refiler le bébé à la nouvelle Commission Juncker, accordant à Paris, à Rome et à Bruxelles, un ultime délai de trois mois pour vérifier si les nouvelles propositions de réajustement (pour la France, 3,6 milliards d’euros de nouvelles économies, assez optimistes…) étaient crédibles. Il faut savoir que la France est passée tout près de l’enclenchement du processus de sanctions, pas du tout d’ailleurs du fait de la Commission ; comme le clament les nationalistes europhobes de France et d’ailleurs, mais du fait des ministres des finances de la zone € eux-mêmes qui en ont vraiment marre des tours de passe-passe et reculs permanents de 2 ou 3 pays cigales qui ne veulent pas se réformer …et contaminent la compétitivité européenne.

Bref, contrairement aux déclarations de « victoires » entendues et lues un peu partout fin novembre par des politiques et des journalistes, la France n’est pas vraiment sortie d’affaires, et je suis pour tout vous dire assez inquiet quant aux possibles sanctions. Sans faire du « french bashing » (formule à la mode dès que l’on profère une critique ; mais on ne dit rien sur ceux qui font en permanence de « l’Europe bashing »), il est vrai que nous sommes souvent arrogants et donneurs de leçons à l’endroit de nos voisins, tout en restant aveugles devant nos immobilismes et notre faillite. C’est quand même la France qui a décidé seule de … repousser d’elle-même à 2017 ses propres délais pour réduire le déficit. Qui a taclé la Commission (« le budget de la France se décide en France », « la France décide seule ce qu’elle doit faire » dixit manuel Valls à l’Assemblée nationale ). Certes, mais elle est surveillée par tous les autres pays de la zone € qui sont liés entre eux par l’euro. Ou alors, que la France sorte de l’euro, et elle verra bien ce qu’elle deviendra. On ne peut pas avoir la protection de l’euro sans respecter la solidarité partagée. Ça c’est le beurre et…… Si la France plonge, elle entraine les autres. Et réciproquement. On l’a vu, même… avec la Grèce, et la tempête sur les marchés des prêteurs qu’elle généra !

Il faut simplement, et on en revient toujours à ce manque de courage, que nos gouvernants du moment aient le courage d’expliquer les choses aux Français, qui sont tout à fait aptes à les entendre, et à les comprendre. Saluons la lucidité de Didier Migaud, excellent Président de la Cour des Comptes : « nous sommes le seul pays à accepter un déficit aussi constant et durable. Notre déficit n’est pas « seulement lié à la conjoncture », c’est un déficit structurel ». Il taclait ainsi… le Premier Ministre. Et il a dit cela malgré le fameux plan de 50 milliards d’ économies sur trois ans, qui ne sont qu’une longue addition de micro-économies, afin de ne pas trop mécontenter personne. On reste dans le meccano, pas dans les économies stratégiques fortes, à l’instar des autres pays. Voir le tollé pour 700 millions d’allocations famille enlevés. Le budget de la France est de….300 milliards.

C’est l’éternel mensonge, ou cynisme de cette génération de politiciens qui n’assurent jamais, même ceux qui sont européens. Ils ne sont jamais en échec (à part Rebsamen : « soyons francs : nous sommes en échec sur la politique du chômage »), c’est toujours la faute à quelqu’un ou quelque chose : faute à l’euro (au fait, il baisse depuis des mois, est-ce que les exportations se portent mieux ??…) ; faute à Madame Merkel (dixit Arnaud Montebourg, qui fut, en son temps ministre, l’erreur de casting du gouvernement) ; faute à la conjoncture internationale ( ?…) ; faute aux délocalisations ( ?! 20.000 sur 3 ans, et 30.000 localisations nouvelles d’entreprises étrangères en France) ; aux travailleurs détachés (120.000 fraudes d’entreprises contre 5.400.000 chômeurs…) ; aux Roms (14.000 en France.. sur 66 millions d’habitants) ; et aux immigrés en général, bien sûr !! C’est toujours la faute aux autres. Jamais à nous. Déjà, en 1930, c’était la faute aux « Polacks », aux « Ritals », plus tard aux « Espagos », puis évidemment aux Maghrébins . J’en passe, et des pires. Je salue quand même ici F. Hollande et son discours courageux sur « l’immigration qui est une chance ». Même s’il a enterré le vote des étrangers…

La France veut toujours une Europe française. Elle ne l’aura pas à 28, puis à 30 / 32. Comme le Royaume-Uni, elle devra prendre ses responsabilités un jour : s’adopter ou sortir. A nous de choisir les politiciens les plus responsables – ou les moins pires. Si vous voyez ce que je veux dire…

Face aux soucis budgétaires et à la « surveillance » bruxelloise, le gouvernement Valls, débarrassé enfin de Montebourg, s’appuie sur un espoir dénommé Emmanuel Macron. Un homme qui a quand même repris le terme de Jean-Claude Juncker (pour l’Europe) : « je veux un New Deal pour la France ». Qui veut faire bouger les lignes. Un homme brillant, lucide et sincère, qui dit : « la France a trois maladies : la défiance, la complexité et le corporatisme ». Certes, elle en a bien d’autres, mais c’est un début.

Desserrer les freins, les blocages, les corporatismes de professions réglementées (notaires, huissiers,) c’est bien, mais face à l’ampleur des problèmes (déficit et chômage), c’est assez dérisoire, bien que la symbolique soit forte. Cela aura un impact de 0,1% sur la croissance et l’emploi. D’ici 2015… 2016. On développe les lignes de cars, (et la pollution ?…) , on réforme les Prud’hommes, c’est bien. On simplifie des choses, mais on complexifie ailleurs, avec, par exemple, ce compte de pénibilité qui est une usine à gaz pour les entreprises….Ouvrir un peu plus le dimanche, ne fait pas une politique de choc, réformatrice, comme Schröder ou d’autres, il y a quelques années. Rien sur les taxis… On reste encore dans les mesurettes, les réformettes. C’est juste un tournant nouveau, pour tenter de sortir le paquebot qui gisait en cale sèche..

Ça confortera (un peu) de bonnes mesures, trop lentes là encore à donner leur plein effet : le CICE (crédit impôt compétitivité emploi), 10 milliards en 2014, 12 en 2015, et 15 en 2016. Ou encore le pacte de responsabilité et de solidarité. Mais c’est toujours trop peu, voire trop tard : 2,5 ans de l’actuel quinquennat, pour arriver à cela ! Alors qu’il y a en France 3.800 milliards d’épargne privée peu ou mal utilisée, qui pourrait être injectée intelligemment dans l’économie.

III – la France en Europe…ou je t’aime moi non plus…

La France, dépendante des prêteurs internationaux pour des années, plantée par ses dettes pour des décennies (avis aux enfants et petits-enfants) gagnerait à accélérer la marche vers l’intégration économique et politique de l’Europe .Que l’on prenne le problème par tous les bouts, c’est la seule solution efficace, et urgente. S’unir, ou périr ; Ses dirigeants ou ses opposants non aveugles (il y en a quelques uns…) ont bien compris que seul, un pays ne peut pas s’en sortir, a fortiori s’il est endetté, et en retard d’innovation.

Mais voilà, notre réputation est telle à présent qu’elle suscite méfiance, exaspération et surveillance de nos partenaires, à commencer par nos amis allemands.

Les intentions c’est bien, les actes, c’est mieux. Qu’il est loin, le couple franco-allemand (Mitterrand-Kohl) qui s’estimait, se faisait confiance, et avançait ! On lui doit l’euro ! La seule réussite fédérale mise en place (depuis la CECA). Depuis, ils ont tout freiné, galvaudé, torpillé. Les Chirac, les Sarkozy, les Hollande. Et ceux-là tiendraient à se représenter ? Mais c’est une plaisanterie ?!

Hollande est européen. Mais alors pourquoi n’en parle-t-il jamais, lorsqu’il « s’adresse aux Français » une heure, sur TF1 ou France 2 ? Alors qu’il sait très bien que l’Europe intègrée, fédérale est la SEULE solution, pour conserver une industrie européenne, comme celle, réussie, de l’Espace ou de l’aéronautique ? Pour avoir une défense et une diplomatie commune, si nos enfants veulent garder leur liberté et leur démocratie ? Pourquoi personne de ces « dirigeants » là ne parle au peuple du Plan Juncker (même s’il est trop faible) de 315 milliards d’euros sur 3 ans, et des 32 projets de la France (pour 48 milliards €) que le gouvernement français a proposé dans ce plan : un Métro Grand Paris Express, la rénovation d’une partie du réseau ferroviaire, dont la modernisation des lignes de fret, l’extension du port de Calais. D’autres ont eu de plus gros appétits, comme les Italiens qui ont présenté des projets pour 81 milliards d’€. Ou les Britanniques, qui ne sont plus à un paradoxe près, pour 63 milliards d’€ de projets. A noter que l’Allemagne ne sollicite que 28 milliards d’€. Au total, des secteurs clés sont priorisés, comme les infrastructures sociales (modernisation des universités et des établissements de santé), la construction de logements sociaux, mais aussi les transports, avec la réhabilitation d’infrastructures portuaires et aéroportuaires, le développement des transports urbains. Et encore, tout ce qui relève de l’efficacité énergétique (rénovation des bâtiments publics) ou de la protection contre les incendies, et de manière générale, tout ce qui permettra de développer l’économie numérique.

Face aux dénigrements permanents de l’Europe, qui fait monter les extrêmes, pourquoi ne parle-t-on pas des projets concrets ? Des avancées ? Pourquoi nos politiciens ne parlent jamais, en appui du Plan Juncker, du plan franco-allemand qui existe grâce à deux économistes missionnés par Emmanuel Macron, Ministre français de l’économie et Wolfgang Schaüble, son homologue allemand : messieurs Henrik Enderlein et Jean Pisani-Ferry. Avez-vous entendu beaucoup de journalistes, de députés (même européens !), de sénateurs, de maires, de ministres, parler de ce plan franco-allemand, et du plan Juncker qui a au moins le mérite d’exister, en voulant relancer la machine par des investissements productifs sur des grands projets, créateurs de croissance et donc d’emploi ?. Avec la mobilisation de fonds européens (certes, c’est du « bon » recyclage ») et de la Banque Européenne d’Investissement, qui gérera un nouveau fonds, le Fond européen d’investissement stratégique (FEIS) avec une task force de la Commission qui sélectionnera les projets concrets présentés par les Etats.

Même si l’investissement de départ, une vingtaine de milliards d’euros est dérisoire, et l’effet de levier (x.15) très optimiste (20 x 15 = 300 milliards annoncés), comptons sur l’effet d’amorçage et sur le changement radical de la Commission européenne qui après une décennie d’immobilisme avec José Manuel Barroso qui céda la gestion de l’Europe à un intergouvernementalisme forcené et égoïste, veut changer de cap avec Jean-Claude Juncker, un Européen très convaincu, qui déclara d’entrée de jeu qu’il allait s’occuper du « 29ème Etat, le chômage », et d’agir pour la croissance et l’emploi. L’épargne privée en UE, c’est 40.000 milliards d’euros. Saura-t-on la mobiliser, l’orienter intelligemment ?

L’UE avec Juncker et quelques dirigeants europhiles (il y en a encore, dépêchons nous) saura-t-elle enfin hâter le pas vers l’Europe fédérale, dans la foulée de l’euro réussi ? Je vous parle depuis deux ans d’harmonisations fiscales, sociales, budgétaires (un budget propre à l’UE), d’union bancaire, d’un Parlement ayant l’initiative des lois, de la fiscalité. Après le coup de semonce des élections européennes de 2014, où la France s’est, là encore, distinguée, si je puis dire, avec l’extrême-droite qui est arrivée en tête avec 25% des suffrages (!!), il ne faudrait plus trop tarder à présent pour agir, pour faire ensemble, et notamment dans la zone euro (l’avant-garde ?) ce « new deal » européen sur le plan économique et cette « révolution politique » sur le plan institutionnel pour aller vers le fédéralisme.

Sans mutualisation et solidarité profonde, nos Etats divisés, petits et endettés sont condamnés. Nos dirigeants le savent très bien. Alors, qu’ils agissent, au-delà de leur (hypothétique) élection, pour l’intérêt général de 508 millions d‘habitants, dont 330 millions en euro avec un nouvel entrant que je salue, la Lituanie.

Mais j’aurai bien sûr l’occasion de continuer à vous parler de ces enjeux et de ces défis, passionnants, mais parfois inquiétants. Je vous parlerai aussi, bien sûr, de mon petit parti, fédéraliste s’il en est (c’est « écrit » dans le titre, mais aussi dans le programme, je vous rassure !)

Après ces quelques secondes de « pub », je vous remercie, cher(e) internaut(e) de votre fidélité. Vous êtes 6.300 depuis 2008 à lire régulièrement mes « billets ». Pardon encore pour ce « retard » de 4 mois !

A chacune et chacun d’entre vous, malgré mes sombres prévisions exposées ci-dessus, je vous adresse mes vœux les plus chaleureux de bonne et heureuse année 2015, tant sur le plan personnel que professionnel.

Vive l’Europe, vive l’Europe intégrée que nous devons approfondir.

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